A la uneActualité

Sommet Afrique-France 2020 Interview Pierre De Gaétan Njikam « Bordeaux, lieu de la réinvention commune de la relation Afrique-France »

Dans un contexte de montée des tensions entre la France et l’Afrique (Franc CFA-Eco, Sahel, immigration…), s’ouvrira en juin prochain, à Bordeaux, le Sommet Afrique-France 2020. Une occasion de renouveler les relations franco-africain selon le co-président du sommet, Pierre de Gaëtan Njikam, par ailleurs adjoint au maire de Bordeaux chargé des partenariats avec l’Afrique et de la Francophonie, et fondateur de la Journée Nationale des Diasporas Africaines (JNDA) qui se tient tous les ans, à Bordeaux.

Propos recueillis par Dounia Ben Mohamed

 

Si Bordeaux accueille le Sommet Afrique-France, ce n’est pas un hasard : cette ville entretient de longues et vieilles relations avec le continent africain. Et c’est de là, que depuis plusieurs années, vous inviter à renouveler les relations France-Afrique, à travers la JNDA notamment…  

En effet, dans moins de quatre mois, soit les 4, 5 et 6 juin, Bordeaux accueillera le Sommet Afrique-France 2020 sur la thématique « Ville et Territoire durables. La géographie, tout comme l’histoire de la ville, de l’agglomération bordelaise, voire de toute la région ont fait de Bordeaux la « ville monde » par excellence. Avec l’Afrique, Bordeaux n’a cessé de tisser des liens étroits, des liens humains, culturels, économiques, universitaires et institutionnels, notamment dans des territoires (Bamako, Casablanca, Douala, Oran, Ouagadougou, etc.) où notre ambition est de renouveler les formes de coopération autour de nouvelles « coalitions territoriales » qui reposent davantage sur des projets « co-élaborés » et « co-réalisés » avec toutes les parties prenantes : décideurs publics, entreprises, universités et organismes de formation, partenaires extérieurs, les populations et leurs diasporas… Accueillir donc le Sommet Afrique-France c’est pour Bordeaux, une manière surtout d’assumer sa vocation d’être le territoire de référence en France, voire en Europe, d’une relation innovante et prospective avec l’Afrique. Sans oublier la tragédie des siècles derniers avec la traite négrière, l’esclavage et la colonisation, il s’agira pour Bordeaux de faire écho aux nouveaux temps de l’Afrique en démontrant notre capacité à reformuler, avec les acteurs africains, ceux actuellement sur le continent et ceux de la diaspora, une nouvelle vision de ce que seront… ou devront être les formes et contenus de la relation de l’Afrique avec la France et l’Europe.

C’est dire s’il est urgent de dire sans cesse ce dont l’accueil du Sommet à Bordeaux est véritablement le signe. Rappelons-nous que c’est à Bordeaux, par une journée d’hivernage, le 31 décembre 1950, physiquement éloignés du continent mais consciemment mobilisés par son devenir dans la tourmente historique des revendications d’indépendances, qu’une génération d’étudiants africains tinrent le Congrès constitutif de la célèbre FEANF (Fédération des Étudiants d’Afrique Noire en France) dont la promesse reste d’actualité en Afrique et dans la diaspora. Bordeaux entend faire de ce 28ème Sommet, un Sommet inclusif et participatif qui permette de faire écho à toutes ces actrices et ces acteurs qui font « bouger » l’Afrique, notamment dans les domaines de l’accès aux biens essentiels, de l’entrepreneuriat, des nouvelles formes de gouvernance territoriale, de l’autonomisation des femmes et de l’épanouissement des jeunes.

 

 

Ceci dit, l’évènement va se tenir dans un contexte de montée des tensions entre la France et l’Afrique, ou du moins avec les populations d’une partie du continent (Afrique de l’Ouest, Sahel) où un sentiment anti-français s’exprime de manière de plus en plus virulente. Ce Sommet peut être l’opportunité d’apaiser les tensions ?

 

Bien sûr. Comme le disait Alain Juppé, il y a quelques mois : « C’est à la fois une Histoire avec sa part d’ombre, mais c’est surtout aujourd’hui une Histoire avec sa part de lumière. » Et il faut espérer, nous en sommes même certains, que le sommet Afrique-France focalisé sur les enjeux de durabilité urbaine pourra contribuer justement à montrer cette nouvelle phase historique de la relation entre Bordeaux et l’Afrique. C’est un peu le paradoxe heureux que ce sommet se tienne dans ce contexte un peu brouillé. L’objectif de ce sommet est de déterminer comment on change les villes pour changer la vie des gens. Ce sommet doit être à la fois inclusif, participatif avec une vraie volonté de co-créer de la valeur. Il y a une vraie volonté pour les acteurs institutionnels, les entreprises, les élus locaux, les sociétés civiles de partager une nouvelle narration dans la relation entre l’Afrique et la France.

 

 

Ainsi, à quatre mois de l’évènement, comment avancent les préparatifs ? Bordeaux rythme-t-elle déjà « au temps de l’Afrique » ?

 

D’ores et déjà, les acteurs majeurs de notre territoire sont déjà mobilisés pour aller à la « rencontre » de cette « Afrique » , convaincus de ce que les « questions africaines » sont devenues les « nôtres », ici et maintenant : l’environnement et la crise écologique, l’accroissement urbain et les mobilités, la sécurité alimentaire, la formation des jeunes, la condition des femmes, la bonne gouvernance… Parmi ceux-ci, et la liste est loin d’être exhaustive : Grand Port Maritime de Bordeaux, la Chambre de Commerce et d’industrie de Bordeaux et de Gironde et le Club Entreprises

Bordeaux-Afrique (CBSOA), Université de Bordeaux, Université Bordeaux Montaigne, Sciences Po Bordeaux et Les Afriques dans le Monde, Girondins de Bordeaux, Rocher de palmer, French Tech Bordeaux, Association des Élus Engagés pour la Relation Afrique-France, diverses personnalités et associations de la diaspora africaine… Tous ces acteurs sont aujourd’hui mobilisés à travers l’initiative organisée par la ville de Bordeaux et Bordeaux Métropole dénommée « Bordeaux à l’unisson du 28ème Sommet Afrique-FranceCette démarche engagée depuis le mois de septembre 2019 se décline en une cinquantaine d’ évènements et d’actions portés par des organismes divers, les diasporas africaines et la société civile bordelaise en lien avec les acteurs d’Afrique. Avec comme point d’orgue à venir, l’édition des JNDA (Journées Nationales des Diasporas Africaines) programmée les 23, 24 et 25 avril prochains autour de la thématique « Construire ensemble l’avenir — Politique, Economie, Culture et Société».

Enfin, Bordeaux ambitionne, à travers ce 28ème Sommet, avec tous les acteurs de son territoire, de travailler à co-construire des solutions à des problèmes communs pour une nouvelle alliance franco-africaine qui fasse sens, au profit des jeunes d’Afrique et de France.

 

Ce message est également disponible en : AnglaisArabe