Un pactole de 188 millions de dollars déposés par des Sénégalais à l’étranger, dans la banque HSBC, et mis à jour par le scandale “Swissleaks”, c’est le débat qui fait rage au Sénégal. Des personnalités de premier plan sont notamment citées dans cette affaire évasion fiscale. C’est le cas du ministre-conseiller du président de la République et non moins auteur-compositeur de renom, Youssou Ndour. Une situation alarmante pour l’économie nationale et qui fait réagir l’économiste Birahim Seck du Forum Civil dans cet entretien express accordé à ANA.
Le scandale de “Swissleaks” qui fait état de 188 millions de dollars déposés par des Sénégalais à l’étranger dans la banque HSBC constitue-t-il une surprise pour le forum civil ?
Cela ne nous surprend pas car on le savait. Mais on n’avait pas les preuves. Mais en réalité, des personnalités avaient des comptes à l’extérieur, à travers leurs activités commerciales, soit de création de sociétés, soit des infractions pénales comme le blanchiment d’argent, le détournement de denier public. L’investigation a montré que nous sommes dans un système de prédation et qu’il faut prendre les mesures nécessaires et surtout prendre les devants. Aujourd’hui, on parle de la fraude fiscale au niveau international, mais même au Sénégal il y a des entreprises qui sont redressées par l’administration fiscale, mais quand elles vont au niveau du Palais, avec les interventions d’autorités sénégalaises, elles passent entre les mailles de l’administration fiscale. La fraude fiscale n’est pas seulement internationale, la fraude fiscale elle est également organisée au niveau étatique. Et il faut impérativement que les autorités rendent compte sur ces redressements non exécutés et sans suite qui sont organisés au niveau du Palais de la République. Ça également, c’est une forme de fraude fiscale dont les gens ne parlent pas.
Est-ce à dire que l’Etat encourage les fraudes fiscales ?
Dans une moindre mesure on peut dire que, aujourd’hui, si une grande entreprise est redressée à hauteur de 5 milliards CFA, 6 milliards, 9 milliards CFA, et que les autorités négocient des fois, elles ne paient pas d’impôts ou elles ne paient que le dixième de ce qu’elles devaient payer, on peut à partir de là dire que c’est une forme d’encouragement de la fraude fiscale par l’Etat. C’est vrai, au niveau international, l’ampleur est si élevé, mais aussi au niveau national, on devrait en parler.
Quelles conséquences peuvent avoir ces fraudes fiscales sur notre économie ?
C’est d’abord qu’on n’aura pas les ressources nécessaires pour réaliser nos projets. Deuxièmement, il y a toujours des pressions fiscales, car il y a un déficit de ressources et cela va impacter forcement sur l’émergence des pays africains. Cela va impacter également sur la difficulté de réduire la pauvreté. Et si on ne prend pas garde pour lutter contre ce fléau, on va toujours entrer dans ces jeux d’enrichissements illicites parce que la plupart des sociétés qui font de la fraude fiscale sont dans des activités illicites.