Nord-Sud La troisième édition du Forum de Saint Louis s’ouvre à Berlin
Après Saint-Louis et Essaouira, la troisième édition du Forum de Saint-Louis se tient du 19 au 21 septembre, cette fois à Berlin. Le choix de la capitale allemande pourrait interpeller. Il est en fait judicieux à plusieurs titres.
Mérième Alaoui, à Berlin
Les participants du Forum de Saint-Louis à Essaouira se rappellent encore de cette ferveur, de cette joie de faire communion pour parler de l’Afrique. Des moments forts en émotions. Il reste aussi des paroles fortes tenues par des figures politiques, des experts, des philosophes, des artistes de toutes les générations. Tout prête à penser que la troisième édition qui s’ouvre au coeur de l’Europe, dans la capitale allemande, sera du même acabit.
Berlin a donc été choisie pour être le troisième théâtre des rencontres pour penser le “renouveau de l’Afrique”. Passer de l’autre côté de la Méditerranée, investir le vieux continent était un passage obligatoire pour les organisateurs. Mais pourquoi Berlin? Tout d’abord la capitale allemande, comme Saint-Louis (Sénégal) ou Essaouira (Maroc) est inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO. Les trois villes ont pour point commun “la quête de l’universel” si chère à Amadou Diaw, président du Forum et meilleur ambassadeur de la ville de Saint-Louis.
A Berlin, le 26 février 1885, les puissances coloniales se “partagent” l’Afrique
Se réunir à Berlin c’est surtout se rappeler que le 26 février 1885, les dirigeants du monde s’y sont retrouvés pour « partager » l’Afrique. Les puissances européennes parmi elles la France, l’Espagne, la Grande Bretagne, l’Italie, la Russie mais aussi les Etats-Unis et l’empire Ottoman ont tranquillement établi les principales règles de colonisation donc leur installation durable. Une conférence de quelques jours qui a vu le destin de millions d’Africains bouleverser pour plusieurs siècles. Mais pas de rancoeur ici. C’est le contraire de l’état d’esprit des organisateurs du Forum. « Presque 150 ans plus tard, l’Afrique se réinvite donc à Berlin, mais cette fois pour faire entendre sa voix, pour communier et partager avec le Monde. Il ne s’agit pas d’effacer l’histoire, mais plutôt de la réécrire… » détaille-t-on.
Enfin, Berlin c’est 1989 dans la conscience collective. La ville est mondialement connue depuis la chute du mur qui séparait l’Europe de l’ouest gérée par la France, les Etats-Unis et la Grande Bretagne et l’est contrôlé par l’URSS communiste. Une situation devenue inacceptable par les Berlinois qui ont par leur geste provoqué la fin de la guerre froide. “Sous cet angle, tous les hommes épris de solidarité, de fraternité, d’entente et d’harmonie sont également des Berlinois (…). Etre Berlinois, c’est donc consacrer plus d’effort et d’énergie à bâtir des ponts entre les hommes, les pays et les civilisations, plutôt que des murs” détaille Amadou Diaw.
“Le continent africain doit être le laboratoire pour un Monde Repensé”
Les grands thèmes annoncés donnent en effet le ton du forum. “Quels avenirs pour les Afriques : d’un avenir subi à un avenir voulu” avec comme problématique : “ Intronisée continent du futur, comment l’Afrique peut-elle être un espace de définition des idées et des pratiques qui détermineront un tournant du monde ?”. Lors de ces trois journées de réflexion, se succèderont au titre de conférenciers André Azoulay -maire d’Essaouira et conseiller politique du roi Mohamed VI-, Hamidou Anne -ancien diplomate et consultant en communication-, Didier Acouetey- Président du groupe AfricSearch ou encore Hamidou Sall, le poète et écrivain sénégalais.
Entre l’Académie des arts ou le Palais populaire, tout l’objectif pour les participants venus des quatre coins du monde est de préparer l’avenir que les Africains souhaitent radieux. “Est-ce que l’on va reproduire les erreurs de l’aventure de l’économie capitaliste du XXe siècle ou prendre un nouveau tournant civilisationnel ? Le continent africain doit être le laboratoire pour un Monde Repensé. Nous devons imaginer de nouvelles formes. Nous devons réinventer une humanité plus riche et ouverte, avec une conscience écologique plus aiguë et une économie plus juste”. Des questions philosophiques mais très concrètes qui devraient rythmer plusieurs jours de débats sur l’Afrique, au coeur de l’Europe.