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Interview « Développer le tourisme local et régional :un marché qui n’existe pas et qu’il faut créer ! »

Éric Fihey, responsable de l’hôtel Sindia, stratégiquement implanté dans cette ville en plein essor, était en plein travaux de développement quand la pandémie est arrivée. Selon lui, un profond renouvellement de la stratégie des acteurs du secteur s’impose à l’aune de cette ère post-Covid 19. En misant sur la clientèle nationale et régionale, en adaptant l’offre touristique à cette niche.

 

Propos recueillis par DBM

 

 

Comment avez-vous vécu l’arrivée de la pandémie Covid 19 au Sénégal ?

 

Nous ayons maintenu une petite activité essentiellement pour aider les naufragés de l’aéroport. En fait, j’ai eu du temps pour jardiner, construire un sentier de piliers et démarrer la construction du bar et de la piscine; ces deux chantiers sont à l’arrêt pour trois mois à cause des pluies.

 

Comment envisagez-vous l’avenir du secteur à court et moyen terme ?

 

Je pense que les événements vont radicalement modifier nos professions car tout est remis en cause. 90 jours de confinement donne le temps de réfléchir. Je crois que dans un premier temps, au moins un an, notre marché se limitera à la clientèle de proximité pour laquelle il faut proposer des offres correspondant à ses moyens, faibles bien sûr. Ici au Sénégal, il faut se tourner vers le marché sénégalais et alentours, un marché qui n’existe pas et qu’il faut créer. Les Africains ne prennent pas de vacances pour la plupart et ceux qui les prennent vont sur les autres continents. Il est temps de rendre l’Afrique aux Africains. Pour le faire, deux écueils majeurs sont à surmonter. Le premier, le transport qui est très cher par voie aérienne, moindre par la route ou le train. Il faut régler cette question par priorité. Ensuite, l’hébergement qui n’est pas encore suffisant. D’autant que la crise va tuer les palaces et 4 étoiles…

 

Finalement, cette crise peut-être une opportunité pour développer le tourisme local avec une offre middle-classe ?

 

En effet, il reste des créneaux importants comme le mien. La définition est simple: il faut offrir une chambre correcte avec salle d’eau propre et séparée de la chambre proprement dite. A cela, il faut accrocher un forfait soit demi-pension, soit pension complète, un programme quotidien de distractions simples (musique, poésie, histoire… ) et créer un panier d’excursions autour du site d’hébergement. Je crois en effet que la mer restera longtemps un aimant pour le loisir mais elle peut être complétée par des activités de vacances plus intenses. Nous, par exemple situé à 10 kilomètres de l’océan et proche de l’aéroport, nous nous dirigeons vers une enseigne très claire: « Bien Sûr …le Sénégal !  » ou « l’Afrique de l’Ouest » ! Nous voulons offrir sur le continent, avec notre petite unité qui sert de porte d’entrée, des excursions sur le grand périmètre autour de Sindia. Avec au programme, entre autres, la côte nord de la Mauritanie, le fleuve Sénégal avec Saint Louis et la découverte de la culture peule, la région autour de Sindia, la Casamance et la Gambie, les îles paradisiaques de Guinée-Bissau… Et pourquoi pas les « petits parcs » qui ne rivalisent pas avec ceux du Kenya, du Rwanda ou d’Afrique du Sud mais sont les seuls endroits pour voir des animaux dans la région. Globalement, la crise va (enfin) offrir à la classe très moyenne de ces pays des vacances dont la structure sera très différente de celle que nous connaissons avant la crise.

 

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